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Comment rémunérer dans l’entreprise libérée ?

Selon le professeur Isaac Getz* libérer les employés de toute forme de hiérarchie et de contrôle permettrait de rendre les entreprises plus épanouissantes et donc plus performantes.


En effet, l’absence de règles imposées, la suppression du contrôle et de la hiérarchie rendrait les équipes bien plus responsables et motivées par l’objectif.


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Dans la pratique, les entreprises libérées au sens strict ne sont pas si courantes, et bien que certaines soient citées régulièrement en référence comme Gore, ou FAVI et Poult en France, il n’existe bien évidemment pas de Label. Pour sûr, une labellisation impliquerait un contrôle ce qui serait contraire à l’esprit même de l’Entreprise Libérée.

On ne peut cependant pas contester que les travaux du professeur Getz inspirent beaucoup de managers et de dirigeants qui voient dans la libération des salariés un moyen de réinventer la relation au travail après des années de dégradation du couple Entreprise/Salarié.

Ainsi, on peut estimer qu’un certain nombre d’entreprises « inspirées par la libération » développeront des modèles d’organisation fondés sur moins de hiérarchie, moins de contrôle et moins de règles.

Dans l’Entreprise Libérée ce sont idéalement les salariés qui décident des investissements et des recrutements, mais qu’en est-t-il de la rémunération ?

Devra-t-on laisser un groupe de salariés volontaires décider des enveloppes de bonus et fixer la rémunération variable des commerciaux ?

Devra-t-on supprimer les règles que constituent les grilles de rémunération et les processus de révision salariale ?

Nous constatons, en tant que professionnels de la rémunération, qu’en matière de reconnaissance financière, la grande majorité des salariés recherche des règles et des processus d’attribution lisibles et clairement expliqués.

A titre d’illustration, nous rencontrons parfois des entreprises qui, dans le but créer un échange constructif avec leurs salariés lors des entretiens annuels, leur posent des questions du type : « De combien estimez-vous devoir être augmenté ? ou encore « Quel est le bonus que vous pensez devoir obtenir ? ».

A chaque fois les retours des intéressés sont les mêmes : « cela me met mal à l’aise, d’autant que je ne connais pas ce que pratiquent les autres entreprises », « j’ai l’impression de me faire avoir à tous les coups, si je demande 3% et que je les obtiens, je me dis que j’aurais pu demander plus », « si je demande 3% et que j’ai 1,5%, la prochaine fois je demanderai le double », etc…

Ainsi, si l’abandon des liens hiérarchiques sous leurs formes actuelles nous semble souhaitable, la suppression des règles et du contrôle reste selon-nous une promesse difficilement tenable en ce qui concerne la rémunération, car même dans l’Entreprise Libérée il faudra garantir l’équité.

Le sentiment d’équité est sans nul doute la première des conditions indispensables à la motivation durable d’un salarié. Pour cela il faudra démontrer une certaine justice procédurale.

Or, si dans une PME de 10 ou 30 salariés l’équité salariale peut-être garantie grâce à l’adhésion de tous à un principe simple de rémunération, comme par exemple une répartition collective du profit et des augmentations de salaires générales, comment envisager raisonnablement ce type de politique dans une société de plusieurs centaines voire plusieurs milliers de personnes ?

Les moyennes et grandes entreprises cherchent à attirer et à fidéliser les talents, à faire de la diversité un réel avantage compétitif. Ces objectifs semblent difficilement compatibles avec l’absence de règles permettant d’individualiser la rémunération et d’assurer ainsi l’équité par la juste rétribution de la valeur créée.

Pour ces entreprises il parait également délicat de confier la politique de rémunération à un groupe de salariés n’ayant aucun lien hiérarchique avec les bénéficiaires des systèmes. Devrait-on alors faire voter l’ensemble des bonus par référendum ?

Une chose est sûre : les entreprises « inspirées par la libération » devront aligner leur politique de rémunération sur les changements apportés dans leur organisation et leurs règles de gouvernance.

Sans aller jusqu’à supprimer toute forme de rémunération variable individuelle, elles auront intérêt à développer différentes formes d’association des salariés à la performance collective. Les dispositifs d’intéressement et d’épargne salariale ainsi que les différentes formes d’actionnariat salarié devront y être largement répandus.

*Le professeur Isaac Getz, docteur en Psychologie et en Management, est professeur à l’ESCP Europe. Il est reconnu pour ses divers travaux et est co-auteur avec Brian M. Carney du bestseller Liberté & Cie.

Et si la rémunération devenait un outil de motivation ?

Article rédigé par :
Thierry Magin
Directeur associé
Co-fondateur de MCR
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